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L’École

Aujourd’hui, suite à une baisse drastique d’effectifs, l’école de Ceillac ne compte plus qu’une seule classe avec… 9 enfants en tout et pour tout. L’article ci-dessous a été rédigé en 2020 lorsqu’il y avait encore 20 élèves qui fréquentaient l’école…

« la Ruche du Cristillan », se compose de 2 classes : la classe des « petits » (PS, MS, GS, CP et CE1) et la classe des grands (CE2, CM1, CM2). Cette répartition peut varier suivant les effectifs des classes d’âge. L’équipe pédagogique se compose de 2 professeurs des écoles et d’une Atsem (agent territorial spécialisé des écoles maternelles).

L’école actuelle a été construite en 1979 et comprend deux salles de classes mono-espaces de petite surface, avec un bloc sanitaires commun.

Auparavant, l’école se situait au rez-de-chaussée de la mairie. Les salles de classes se montrant par trop exiguës et le nombre d’enfants augmentant, la commune a décidé de construire une nouvelle école de conception pour le moins classique, sans espace sieste pour les petits par exemple…

Comme tous les enfants de France, les enfants Ceillaquins apprennent à parler, à lire, à écrire, à compter, à vivre ensemble, à s’ouvrir… mais ils sortent aussi beaucoup, en toutes saisons, pour faire du ski alpin, du ski de fond, des raquettes, des randonnées, de l’escalade, du tir à l’arc… La vallée, située dans un parc naturel, est belle et ils en profitent !

Séance de ski de fond encadré par Thierry (photo MC)
En chemin vers le lac des Prés Sébeyrand avec Séverine (photo MC)
Séance de Tir à l’arc
Sur la falaise de la Viste (photo MC)
Sur la piste des Fontinets. (photo MC)
EFFECTIFS

En 2021, dans la classe des petits, il y a 8 élèves. Dans la classe des grands, il y en a autant, soit un total pour l’école de 16 enfants…

Une baisse d’effectifs donc que l’on relève dans les autres écoles du Queyras et dans les Alpes plus généralement et qui révèle un problème de fond lié au travail, à l’hébergement, aux services, au climat, à la vie sociale…

Des effectifs en baisse, une problématique commune à beaucoup de villages de montagne. (compter +3 enfants nouveaux en 2021)
FONCTIONNEMENT ~ ÉQUIPEMENT ~ MOYENS

Les classes sont bien équipées avec notamment, pour chacune un ETI (écran tactile interactif) qui se révèle être un outil d’importance pour les classes à niveaux multiples. Le reste de l’équipement est classique : bibliothèques de classe, matériel didactique important, copieur réseau, ordinateurs portables, appareil photo numérique…

Pour se rendre à l’école le matin, à 9 h, les enfants utilisent vélos, trottinettes, voitures ou leurs pieds ou encore leur luge l’hiver. Il n’y a pas de transport car ils habitent tous au village. L’école finit à midi et reprend à 13 h 30 pour finir à 16 h 30.

La cour n’est pas très grande mais la vallée constitue un très beau et vaste terrain de jeux.

L’école a la chance aussi d’avoir un accès permanent à la salle polyvalente et de pouvoir l’utiliser quand elle n’est pas utilisée, pour le sport, la musique, les projections de films ou les spectacles. Elle est également bien utile quand la météo n’est pas favorable, ce qui est plutôt rare.

L’école a, de fait, un fonctionnement familial pouvant se résumer en préceptorat collectif, avec une bienveillance affichée.

La commune donne des moyens conséquents à l’école ce qui permet d’avoir un bon équipement dans les classes, de fournir l’intégralité du matériel aux enfants, d’organiser une classe de découverte tous les deux ans avec un coût très réduit pour les familles, d’organiser avec des brevets d’état des activités sportives (ski nordique, raquettes, VTT, tir à l’arc, escalade…).

Les 28 enfants de l’école en 2016 (photo MC)

Quelques activités régulièrement pratiquées à l’école(photos MC)

CLASSES DE DÉCOUVERTE

Les différentes municipalités qui se sont succédé à Ceillac ont toujours apporter le soutien nécessaire à l’école afin qu’elle puisse organiser régulièrement – tous les deux ans – des classes de découverte.

Ces 2 dernières décennies, les destinations ont été variées :

  • Vendée
  • Camargue
  • Corse
  • Paris et Poitiers
  • Classe péniche sur le Canal du Midi
  • Noirmoutier
  • Pradet (Var)
  • Paris et Saint-Malo
  • Biabaux (Alpes de Haute Provence)

(nb : les cptes-rendus des classes de découverte seront mis en ligne au fur et à mesure…)


AINSI FOND, FOND, FONT

Ce film réalisé par Floriane Chouraqui et Carmen Alix retrace le travail effectué dans la classe des grands durant l’année scolaire 2019~2020, un travail qui traite de la résilience des territoires alpins face à leurs problématiques (projet interuniversitaire européen CORESTART).

A Ceillac, ces problématiques concernent notamment les risques démographiques et climatiques. Les enfants ont donc enquêté, interrogé les habitants, recueilli des données et réfléchi à des solutions…


ET AUTREFOIS ?

En 2002, les enfants ont interviewé la regrettée Marie Imbert, 80 ans, qui a leur a décrit la vie scolaire d’Antan, vers 1930…

Quand commençait et se finissait l’année scolaire ?

La rentrée avait lieu le 1 er octobre (à condition que les pommes de terre aient été ramassées !), et l’école durait jusqu’au 15 juillet (sauf pour les grands qui aidaient aux foins) avec des vacances à Noël et à Pâques.

Il y avait classe du lundi matin au samedi après-midi compris. Le jeudi étant vaqué (catéchisme).

Il n’y avait pas de vacances à la Toussaint ni en février.

A quel âge les enfants fréquentaient-ils l’école et jusqu’à quand ?

Les enfants sont scolarisés de l’âge de 6 ans (ils sont gardés à la maison jusqu’à leur admission) jusqu’à 14 ans, âge où ils passent le certificat d’études que la plupart obtenait.

Après le certif, la grande majorité des enfants travaille. Les rares qui continuent font souvent le séminaire, seule voie permettant de poursuivre ses études sans apport financier.

Le découpage était identique à aujourd’hui : CP, CE1, CE2, CM1, CM2. Les redoublements étaient assez fréquents. Les dernières années étaient consacrées aux approfondissements et à la préparation du certif.

Les classes étaient-elles mixtes ?

Non, le conseil municipal, avec l’appui des parents et du curé, a refusé de géminer les classes En 1933. Elles le seront finalement en 1943.

De quel matériel disposait les enfants ?

Chaque enfant dispose d’un porte plume (avec des plumes Sergent Major), d’un encrier (intégré à la table), d’une boîte de crayons de couleur, d’un crayon noir, d’une gomme, d’une règle… Le matériel est acheté par les parents.

Les livres étaient fournis par l’école : lecture, arithmétique, histoire géographie sciences.

Quelle était la journée-type des écoliers ?

Les journées se ressemblaient beaucoup avec souvent le même déroulé… :

MATIN

APRÈS-MIDI

  • morale (1 phrase au tableau)
  • calcul mental
  • résolution de problèmes
  • récréation
  • instruction civique
  • récitation
  • histoire-géographie-sciences : récitation de la leçon précédente, présentation de le nouvelle leçon, travail écrit sur cette nouvelle leçon
  • grammaire, conjugaison, orthographe
  • pas de sport, pas de musique
  • dessin 2 fois par semaine
Les enfants de l’école en 1952 (photo J. Favier)

Aviez-vous beaucoup de devoirs ?

Nous avions tous les soirs des devoirs écrits et des leçons à apprendre nécessitant, en général, une heure de travail.

Que faisiez-vous après l’école ?

L’école finie, il y avait un moment de jeux puis il fallait charrier de l’eau pour les bêtes, avec un petit traîneau l’hiver puis c’était le temps des devoirs.

Comment se passait la récréation ?

Il n’y avait pas de cour, la récré se passait sur la place du marché. Les filles et les garçons avaient récréation en même temps mais ne jouaient pas ensemble

Quelle était la relation instituteurs-curé ?

Les relations n’étaient pas faciles. Parfois, le curé intervenait lors de la récréation auprès des enfants au grand dam des instituteurs.

Qui étaient les instituteurs ?

C’était souvent un couple originaire de la ville ou du bas du département, monsieur se chargeant des garçons et madame des filles, comme il se doit…

Leur intégration dans le village était assez limitée.

Et le patois ?

La tâche des maîtres était compliquée par le fait que les enfants parlaient naturellement le patois ; il fallait donc leur apprendre d’abord à manier le français spontanément…

Quelle était l’ambiance à l’école ?

L’ambiance était sévère et les instituteurs étaient craints. Rien n’était pardonné et les sanctions nombreuses : claques, coup de règle, lignes, retenues… Les enfants constituaient un groupe assez soudé, personne ne dénonçant personne.

De fait, le relationnel entre les instituteurs et les enfants était peu développé. Les enfants étaient plus dressés qu’éduqués.

Si beaucoup d’enfants aimaient aller à l’école, ils regrettaient cette ambiance sévère.

Quel était le fonctionnement des classes ?

Il y avait une classe d’une vingtaine de 20 garçons et une classe avec autant de filles. Les CE forment un groupe, les CM un autre.

Les grands n’étaient pas sollicités pour aider les petits dans leurs apprentissages, en lecture notamment.

Quant aux services, deux enfants étaient désignés par semaine, à tour de rôle avec pour tâches : emplir les encriers, faire le bois, allumer le poêle, balayer la classe, essuyer le tableau.

La santé des enfants était-elle suivie ?

Quelques activités pratiquées régulièrement à l’école… (photos MC)

Non, il n’y avait aucun dépistage, pas de médecin scolaire, pas d’infirmière. Les enfants voyant mal, à défaut de lunettes, étaient placés devant le tableau.

Quelques jalons concernant l’école au XX ème siècle…

1903 : école des filles, 45 élèves, 15 étant présentes en classe en juillet et en août.

1904  : lettre du préfet concernant la dignité et la santé des enfants : les habitants de la commune nettoieront, à tour de rôle, l’école et les cabinets d’aisance.

1905 :  Réfection des écoles.

1910 : Suite à une lettre du préfet, le Conseil Municipal est d’accord pour que l’école soit annuelle pour les garçons et temporaire pour les filles. (!)

1933 : Refus du Conseil Municipal de géminer les classes.

1936 : Décharge de responsabilité des instituteurs en cas  d’accident lors du sciage du bois par les enfants.

1938 : Incendie dans la salle de classe des jeunes filles ravageant celle-ci en totalité. (2500 F de dégâts).

1941 : Projet avancé mais avorté de la  construction d’un terrain scolaire avec bâtiment d’éducation physique et sportive (terrain de volley, de basket, aire de saut, aire de lancer, piste de course, vestiaires, douches, salle de gymnastique …).

1943 : Les 2 classes sont enfin géminées.

1952 : Prévision de l’installation de l’électricité et de l’eau aux écoles avec installation de lavabo.

1953 : Achat de pupitres pour l’école : 336 000 F. Prévision de travaux importants pour l’école (revue et corrigée en 54, révisée en 58).

1968 : Réfection de la mairie et de l’école. (nettoyage, modernisation, lieux d’aisance, isolation, éclairage néon, chauffage central…).

1975 : Création d’une classe enfantine.

1976  : 21 élèves en primaire, 18 élèves en maternelle (classe créée l’année précédente).

1977 : Décision de construction d’une nouvelle école à 2 classes (réalisée en 79).

1979 : La nouvelle école fonctionne.

1980 : Mise en place du transport régulier Ceillac~Guillestre quotidien pour les enfants scolarisés au collège de Guillestre.

1981 : 16 élèves en primaire, 19 en maternelle. Création d’un poste d’aide-maternelle à temps partiel.

1984 : Installation du téléphone à l’école.

2000 : 21 enfants présents à la rentrée des classes (11 grands et 10 petits)

ET ENCORE AVANT ?

Victor Hugo parle de l’école dans le Queyras, au début de son œuvre la plus universelle, « Les Misérables » :

Aux villages où il ne trouvait pas de maître d’école, il citait encore ceux de Queyras :

– Savez-vous comment ils font ? disait-il. Comme un petit pays de douze et quinze feux ne peut pas toujours nourrir un magister, ils ont des maîtres d’école payés par toute la vallée, qui parcourent les villages, passant huit jours dans celui-ci, dix dans celui-là, et enseignent.

Ces magister vont aux foires où je les ai vus. On les reconnaît à des plumes à écrire qu’ils portent dans la ganse de leur chapeau. Ceux qui n’enseignent qu’à lire ont une plume ; ceux qui enseignent la lecture et le calcul ont deux plumes ; ceux qui enseignent la lecture, le calcul et le latin ont trois plumes. Ceux-là sont de grands savants.

Mais quelle honte d’être ignorants ? Faites comme les gens de Queyras…

L’ÉCOLE EN 1806 DANS LES HAUTES-ALPES

Avant l’écriture des Misérables, publié en 1862, voici de courts extraits de « la vie publique des Hautes-Alpes » où est décrit le fonctionnement des écoles Haut-Alpines au début du XIX ème siècle.

Où l’on apprend que :

  • l’église régentait tout ce qui avait trait à l’éducation, au recrutement des instituteurs, à leur évaluation.
  • les maîtres d’école devaient prêter serment
  • la durée était bien souvent fonction des travaux agricoles
  • l’école de Ceillac comptait alors 100 élèves (13 prévus en 2022)

en téléchargement : l’école au XIX ème siècle dans les Hautes-Alpes

Article écrit par Michel C.
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